« Négociations » sur les salaires : par ici la sortie… !

Comme une porte qui vous claque sur les doigts… La négociation sur les salaires à la Cnam et dans le service médical a été close sur consigne de M. Fatome dès la 1ere séance de négociation, ce vendredi 3 juin 2022 alors que 2 séances étaient  prévues. De ce fait, l’accord de méthode n’est pas respecté.

Cette négociation sur les rémunérations avait été incluse dans l’accord de méthode relatif sur les négociations sociales 2022 signé en février 2022.

Nous espérions donc (naïvement) ne pas avoir affaire à cette brutalité au moins sur les salaires. Quand on sait que le prix de l’essence a été multiplié de plus d’1/4 en quelques mois et que la hausse des prix sur les 12 derniers mois frôle les + 5%, oui, on s’attendait à un peu d’ouverture sur le sujet.

Que dalle.

Oui, que dalle. Quand on sait  qu’entre 20 à 30% des employés du service médical (proportion de celles / ceux qui touchent la prime d’activité) sont déjà passés « en mode survie » malgré souvent un travail à plein temps à la Sécurité Sociale ! Un scandale ? Non une politique de gestion qui méprise « juste » le travail et les travailleurs.

Pour s’en expliquer, la direction argue qu’elle ne négociera rien car l’Ucanss va prendre des mesures unilatérales pour revaloriser (très dégressivement) les petits salaires compris en moins de 222 et 255 de coefficient (soit les salaires inférieures à 1530 € nets environ). Et que cela suffira bien non mais !?

L’Ucanss va bien prendre des mesures unilatérales en juin 2022 (avec rétroactivité au 1er janvier 2022) sur les seuls bas salaires. En clair : elle va mettre les plus petits salaires en conformité avec le SMIC(le salaire minimum légal) qui a été revalorisé au 1er mai et attribuer quelques pièces à celles/ceux qui touchent un salaire inférieur compris entre 1300 et 1500 euros nets.

Exemple, si votre salaire est de 1500€ nets environ (coefficient entre 252 et 255), votre augmentation sera de 12 € nets / mois. Énorme n’est-ce pas ? Au-delà de 1530 € nets, nul ne sera augmenté. A noter qu’un supplément à l’intéressement de 200 € (non cotisés à la Sécurité Sociale qui nous paie !) est annoncé en juillet 2022.

C’t goutte d’eau… !

Malgré de longs mois de mobilisations et de grèves souvent très suivies depuis 2020, Il n’y a pas eu d’accord sur les salaires à l’Ucanss. Et pour cause ! Tous les syndicats de la Sécurité Sociale restent toujours unis pour revendiquer une hausse de la valeur du point étant donné la situation déplorable des salaires dans toutes la Sécu après 11 ans de gel des salaires.

Mais le (nouveau) gouvernement et « nos tutelles » restent droits dans leur brutalité et sourds à la réalité de la vie notamment celles des employés. L’Ucanss maintient ainsi que la valeur gelée du point ne bougera pas et ce malgré l’annonce (en pleine campagne électorale) d’une revalorisation des fonctionnaires que nous ne sommes pas. Puisqu’à la Sécu, nous sommes tous des salariés de droit privé !

La direction annonce une hausse de RMPP[1] de +0,08 point en 2022. De +1,5 % (bloquée depuis 4 ans), la RMPP passerait donc à +1,58 % pour 2022. En clair : quasiment rien.

Quant à la mesure Ucanss sur les bas salaires, celle-ci serait financée par une enveloppe budgétaire spéciale de +0,25%, ajoutée à la RMPP. En clair n°2 : les bas salaires qui vont toucher la mesure Ucanss vont devoir s’assoir sur toute autre mesure individuelle.

Car les directions des établissements vont utiliser la RMPP pour revaloriser les autres (et qui en ont aussi besoin !). En clair n°3 : la mécanique des inégalités va s’accroître avec l’institutionnalisation de collaborateurs pauvres, reconnus comme tel et « traités » à part.

Des salarié.e.s de seconde zone : c’est humiliant !

Il nous est annoncé que la RMPP 2022 pourrait encore monter à +1,8% s’il y avait un accord (en négociation)  sur la reconnaissance des personnels de formation (+0,3 point de RMPP). En clair n°4 : si vous n’êtes pas formateurs certifiés et travaillant pour l’essentiel à l’institut 4.10 : vous n’êtes pas concernés non plus !

Voilà comment la direction arrive à justifier qu’il n’y ait rien de plus à négocier à la Cnam sur les salaires. Les détails des mesures unilatérales Ucanss seront juste présentées au CSE-C du 17 juillet 2022. Et puis c’est tout !

Malgré tout cela, nous avons rappelé quelques « basiques » et poser des revendications car, à la Cgt : « on est là pour ceux / celles qui ont besoin d’argent. ». Et tant pis si on nous méprise.

Nous saisissons l’obligation légale que la direction a de nous écouter pour faire passer nos analyses et nos revendications, très concrètes, et finalement plus que raisonnables (par-delà de l’urgente revalorisation du point).

Vous le savez, depuis plusieurs années, la Cgt a mené des études approfondies pour montrer combien les inégalités salariales sont une réalité à la Cnam et tout particulièrement dans les échelons locaux du service médical qui concentrent l’essentiel des personnels ! (voir pour cela l’Écho des négos n°14 – très complet sur le sujet – ou encore la dernière analyse de la politique salariale 2021 faites au CSE-C du mois de mai ou encore celle du bilan social 2021).

Le problème des salaires et des inégalités à la Cnam est documenté par la Cgt depuis des années. Toutes la connaissance est là ! Lors de la « négociation du 3 juin », la direction a aussi apporté des données (une 1ere !). Elles corroborent d’ailleurs nos analyses.

Des propositions Cgt pourtant très simples, concrètes

Dans cette « négociation », la Cgt est donc revenue sur sa proposition d’expérimenter un nouveau système de prime pérenne pour toutes celles et ceux qui en sont privés à ce jour (du niveau 2(II) au niveau 7(VI), ISM incluses bien sûr (+ la prise en charge de la cotisation ordinale).

Réponse de la direction: on ne touche pas au système inégalitaire des primes sur objectifs pour les seuls cadre sup’, PC et agents de direction.

Nous avons aussi reproposé que pour tout salarié volontaire un portefeuille d’heures supplémentaires (limitées à 80 heures par année civile) soit ouvert. Ces heures supplémentaires devant être majorées à 50 % dès la 1ere heure en plus travaillée. Cela serait compatible et cumulable avec les accords sur la réduction du temps de travail (RTT).

Réponse de la direction: des heures sup’, il y en a déjà. On en fera pas plus.

Compte tenu de l’urgence, nous proposons aussi en plus pour 2022 de faciliter la possibilité de monétiser jusqu’à 5 RTT (majorées à 50% du salaire de référence) car nous considérons que ces heures doivent être considérées (quand elles sont « vendues » à l’employeur) comme des heures sup’.

Réponse de la direction: on va faire la pub de ce qu’il est possible de faire via la CET. En clair : pas de majoration des jours vendus qui doivent l’être en plus sur justification, humiliante d’ailleurs, en mode « j’ai besoin de sous car je suis pauvre chef !?? »).

La démonstration par les chiffres et les données ne débouchant sur rien, comme toujours. Nous avons aussi mis l’accent sur les témoignages concrets des collègues sur le mode « voilà comment on vit comment avec 1400 € / mois à la Cnam, le salaire moyen d’un N3 avec une dizaine d’années d’expérience ».

Face à ce réel-là, à la parole des gens, les représentants de leur direction de la Cnam sont restés fidèles à leur stoïcisme professionnel. A voir combien de temps leur posture est encore tenable. Car la situation n’est plus tenable et cela tout le monde le sais très bien.

Vous pouvez d’ailleurs continuer à vous exprimer sur le forum de la Cgt ou en bas de cet article.

Le monde réel, pour beaucoup de collègues, c’est cela :

Coralie : « Quand on voit qu’un salaire est de 1280 euros nets environ pour niveau 3, bientôt maman de 2 enfants et qu’un parent solo au RSA pour 2 enfants touche 1080 euros environ. On se lève pour 200 € ? Mais aussi pour payer plus cher notre essence, notre logement, les crèches, les mutuelles, l’énergie. Au final à quoi bon travailler car on s’en sortirait mieux aidés par la Sécurité Sociale que payés par celle-ci !? Il faut motiver ses équipes. Il y a 10 ans, nous percevions les mêmes salaires, nous faisons du sur place tandis que le prix de la vie est en augmentation constante. Un peu de respect pour les travailleurs ! »

Clémence : « Assistant technique dans le Hainaut : avec un salaire de niveau 4, le 25,  je fais le plein d’essence et de course et je ne touche plus à ma carte du mois. J’essaie de garder de quoi remettre 20 euros de diesel…donc moins de 10 litres pour aller chercher mes enfants. Les tickets restaurants, c’est pour la viande. Voilà, c’est presque de la survie. Il faut faire des choix tous les mois. Je suis passé en logement social, j’ai réduit le chauffage, j’ai changé de magasin, je vais travailler à pied et pourtant je m’en sors de moins en moins bien….. il est temps que nos salaires bougent. 10 ans c’est très long ».

Grégoire : « Je pense que ce gouvernement et la direction de la Cnam ont la mémoire courte car ils oublient que le personnel de l’assurance maladie s’est amplement investi dans l’activité contact tracing, au détriment de la vie de famille quand nous acceptions de travailler le samedi et le dimanche. On oublie que la Covid19 est toujours là, et on oublie dans la foulée le personnel qui a œuvré pour limiter la chaine de contagion »

Lucy « Mon ELSM est à 40 km de mon domicile, sans transport en commun, la voiture est une nécessité. Désormais le prix du carburant fait réfléchir à 2 fois pour tout autre achat. Niveau 3 avec 10 ans d’ancienneté et payée quasiment au niveau d’un nouvel embauché (car ils ont dû s’aligner sur le SMIC), j’en ai assez de devoir toujours calculer pour savoir si je peux me permettre telle ou telle dépense, croiser les doigts pour ne pas avoir de panne de voiture. On travaille pour avoir les moyens d’aller travailler. Ce n’est pas normal… Cela doit cesser. On devrait travailler pour pouvoir vivre dignement. »

Carine : « En tant qu’ISM nous sommes les oubliés de notre profession! Les agents de la fonction publique hospitalière ont vus leur rémunération augmenté grâce à une prime de revalorisation de 183€/mois (auxquels s’ajoutent +107€ net pour un débutant sans expérience de revalorisation de la grille hospitalière.). Nous n’avons pas bénéficié de la prime Ségur, Nous réclamons la même valorisation salariale que celles octroyées à nos collègues soignants. Nous avons le même diplôme initial! Mais nous sommes « les oubliés ».Et il n’y a pas de revalorisation du point pour l’Ucanss (ou bien si, mais seulement pour les fonctionnaires), nous sommes encore à côté. Alors que l’inflation énergétique et de la vie quotidienne est bien là! Que nos dépenses sont de plus en plus conséquentes… »

Gisèle : « Je suis technicienne au Service Médical de Nantes depuis le 2006. Mon salaire net mensuel avant prélèvement à la source est d’environ de 1500 euros alors que je suis à 39 h. Mon loyer en-dehors des charges est de 600 euros. Je suis obligée de demander une aide financière supplémentaire à ma famille pour pouvoir m’en sortir financièrement. Je compte quand je fais les courses alimentaires. Il ne me reste plus grand chose pour aller jusqu’au prochain salaire. La valorisation du point à 10 euros sera la bienvenue. Je rappelle que le personnel des Services Médicaux travaille pour le service public, à savoir la protection sociale. »

Macha : « Embauchée début 2021 au niveau 3, le salaire est bien bas par rapport à la pression professionnelle et l’exigence des uns et des autres ! Si je prends mon brut sans les primes PA cela ne correspond même pas au SMIC. Soit 1580 € BRUT. Des diplômes demandés et de l’expérience pour exercer, et on n’est pas payé à sa juste valeur ! Tout augmente, le SMIC, les aides sociales, la prime d’activité, et les frais aussi augmentent par rapport à l’inflation, où est l’égalité par rapport au travail ? »

Thierry : « Je suis arrivé il y a de cela plus de 7 ans maintenant, embauché en étant niveau 2. Actuellement niveau 3, je perçois un salaire de 1270€ net par mois. Autant vous dire qu’avec ce salaire, je ne m’en sors pas. Après avoir payé le loyer, les factures, s’ajoute à cela la hausse des prix, l’augmentation du prix de l’essence… Donc je travaille pour pouvoir payer mon moyen d’aller travailler ! Ridicule. A la fin du mois, mon compte bancaire est soit à 0€, soit à découvert. Aucune possibilité d’épargner ou de faire des activités, ni même prévoir de partir en vacances car même ces prix-là ont augmenté! Du coup, je réfléchis à chercher un autre poste ailleurs car avec ce salaire ce n’est plus possible. Encore 30 ans de carrière devant moi, je ne me vois pas dans ces conditions-là sauf si un miracle s’opère. J’estime pourtant faire un travail de qualité mais complètement non reconnu finalement… L’impression que cela ne sert à rien de s’investir, encore moins pour gagner 7€ de plus sur mon salaire éventuellement tous les 3 ans! »

Christophe : « Nouvel embauché à l’ELSM de Montpellier, j’apprends que le SMIC va dépasser mon salaire mais que comme le point est  » gelé  » je toucherais moins que le salaire minimum légal en France. Pas d’APL, une prime d’activité qui me permet de mettre 3 sous de côté pour mes futures projets très péniblement. J’ai un master, j’ai pris ce job faute de mieux dans la région car je n’ai pas l’argent pour déménager. Bientôt payé à plus bas que le SMIC à 39h semaine. Le tout en sous-effectif car démission et bientôt un départ à la retraite, aucun des postes ne sera remplacé. Même se syndiqué coute trop cher quand on est niveau 3.  La colère monte, et plus vite que l’inflation. »

Emilie : « je laisse un dernier commentaire avant de rendre ma démission. Je suis arrivé il y a 1 an et demi et je touche entre 1150€ et 1300€ net par mois. Mes charges : Loyer : 400€ (colocation) pas le droit au APL car « je touche trop » (merci la réforme macron) ; électricité/box/eau : 50 € ; assurance habitation : 20 € ; abonnement téléphone : 10 € ; assurance auto : 80 € ; budget essence mensuelle : 250 € ; course : 200 €. Résultat : reste à vivre par mois pour 200 € Je ne vais pas faire un dessin. L’épargne : il ne faut pas y penser, prier pour ne jamais avoir d’imprévus (exemple récent : pneus crevé, coût : 110 €). Certes il y a le 13, 14 e mois ainsi que la prime d’intéressement, mais cela nous offres à nous (les petits salariés payés au smic) seulement un petit relâchement de la perpétuelle apnée que nous sommes obligés d’avoir tout au long de l’année. Je vous laisse sur une petite citation : ‘Est perdu celui qui ne se connaît pas à sa juste valeur’ ».

[1] La rémunération moyenne des personnels en place (RMPP) est fixée arbitrairement chaque année dans le Loi de financement de la Sécurité Sociale (LFSS). La RMPP limite (en pourcentage) la hausse des mesures salariales individuelles et collectives (points d’ancienneté, points de compétence, promotions, primes sur objectifs et parts variables) que les agents de la Sécurité sociale peuvent percevoir en moyenne dans une année. Depuis 4 ans (2018), le pourcentage de la RMPP est fixé à un plancher de +1,5% par an. En 2019 : elle a même été inférieur à ce plancher: +1,49%. En 2017, la RMPP était de +1,7% et largement au-dessus de +2% avant 2013. En comparaison, l’inflation (hausse de prix) en 2018 était de +1,8% (+1,1% en 2019). La RMPP conjugue plusieurs effets pervers en lien avec les faiblesses de la classification des emplois et des compétences de la Sécurité sociale qui détermine les rémunérations. La RMPP privilégie notamment la valorisation des hauts salaires en réservant en son sein une part toujours plus importante aux primes destinées aux cadres supérieurs, aux praticiens conseils et aux agents de directions. Ces primes étant indexées sur les salaires de ces hauts cadres, lesquels augmentent plus vite que la moyenne. Résultat: la part de ces primes augmente chaque année au sein d’une RMPP de plus en plus limitée par ailleurs. Ce mécanisme rend «l’argent restant» de plus en plus rare pour les augmentations de la majorité des salariés qui ne sont pas primables. Ȧ la Cnam, seul le siège / sites affiche encore une proportion de personnels augmentés ou promus de plus de 30% en 2019. Il y a 8 ans, cette proportion dépassait 50%. Elle se situe depuis plusieurs années autour de 20% (plancher conventionnel) dans les 16 DRSM de la Cnam.

Une réflexion au sujet de « « Négociations » sur les salaires : par ici la sortie… ! »

  1. Salariée dans le régime depuis 27 ans et la on se sert de mon ancienneté et mes points de compétente pour dire elle est au smic mais non car si je n avais pas atteint cette ancienneté ma base est niveau 3 soit 1585 e brut, le smic lui est de 1693e, ou est le mérite de l ancienneté, quel honte d utilisé notre ancienneté, tout un parcours de travail !!

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