Suppression du Service du contrôle médical de l’Assurance Maladie
Grève totale et rassemblement le 3 octobre 2024
Réponses aux questions que vous vous posez
Est-ce que le plan de transformation du SCM peut devenir une réalité ?
Oui et très vite. Le plan prévoit que l’intégralité du personnel de 4 DRSM (CVL, PDL, GE, BFC) intègrent les caisses de leurs régions dès le mois d’avril 2025. En mai 2025 : les 4 DRSM des DROM intègrent les CGSS. En juin 2025 : 4 DRSM supplémentaires (HDF, Normandie, NA, AURA) partent en caisses. En septembre 2025 : la fusion DRSM/Caisse est terminée avec l’intégration des personnels des 4 dernières DRSM en activité (Bretagne, IDF, PACA, OCCITANIE).
Pourquoi s’opposer quand certains semblent résignés?
Tout le monde n’est pas résigné. L’intersyndicale représente 78 % du personnel. Et plus les jours avancent depuis la révélation du plan, plus la parole des collègues se libère. Des ELSM se sont organisés en collectif, écrivent aux syndicats avec des revendications à relayer au CSEC du 3 octobre. Des sections régionales du syndicat opposé à la grève ont rallié l’appel de l’intersyndicale. Beaucoup de collègues, attachés à leur vie professionnelle et à leur équipe n’ont pas envie de se laisser traiter comme des objets. Ils ont l’intention de se faire entendre. C’est légitime et la grève totale du 3 octobre est un moyen sain et légal de s’exprimer. Et si elle est bien suivie, elle peut être un 1er pas vers autre chose qui respecte l’existence du service médical et ses personnels.
Négocier un accompagnement est-il plus réaliste ?
On ne voit pas ce qu’il y a de réaliste ou « de pragmatique » à accepter sans discussion le déplacement de 7 200 agents en moins d’un an et la suppression du service médical. Imaginez que vous deviez changer de maison. Vous n’allez pas accepter de déménager dans un taudis sans discuter, pour essayer après coup de négocier le prix et éventuellement l’eau courante ? Personne ne ferait ça. C’est pourtant ce que nous propose la CFDT avec le service médical : on commence par déménager, et on négociera plus tard. Avouez qu’on a vu stratégie plus avisée…
Est-ce que les personnels du service médical continueront à travailler entre eux ?
Non. Les 1eres semaines de la fusion DRSM/Caisse, les agents intègrent une direction médicale à durée de vie très limitée puisque sa disparition est programmée dans un délai compris entre 6 et 12 mois après la fusion. Tous les personnels PA et PC sont destinés à intégrer ensuite les équipes de la caisse. Au-delà, seul le top management demeurerait dans cette « direction médicale » qui ressemblerait fort à une coquille vide sans pouvoir hiérarchique, et sous la Direction de la caisse.
Que deviennent les personnels des ERSM ?
Tous les personnels des services supports et les CAM prado sont intégrés lors de la 1ere vague en caisse. Dans quels services ? Rien n’est précisé à ce stade si ce n’est qu’ils intègreraient les services supports correspondant des caisses. Il n’est pas précisé que les personnels RH, du budget, de la logistique et de l’informatique seront affectés dans les services supports correspondant des caisses ; ces services étant déjà dotés en personnel et en management. Le bon accueil de ces derniers n’est donc pas garanti ; et ce n’est pas un éventuel accord d’accompagnement qui permettra de l’assurer aux agents déplacés. Et on s’interroge sur le traitement des cas particuliers comme l’affectation des praticiens, responsables d’un service support.
Que deviennent les équipes métiers de l’ERSM (CEPRA, AOS, GRC, Contentieux, Fraude, GDR) ?
Pour le contentieux, les caisses ont déjà leur cellule. Pour la lutte contre la Fraude (LCF), les caisses sont déjà bien dotées avec du personnel juridique adéquat. L’avenir des PA des services contentieux du SCM est donc posé. Ils devront faire leur place même si leur qualification est parfois meilleure qu’en caisses.
Les PC qui font encore du contentieux (et ils sont rares) peuvent espérer intégrer les services LCF des caisses où leur expertise médicale sera mise à profit mais ils devront composer avec une hiérarchie de cadres administratifs guidés par des objectifs de production sans lien avec leur préoccupation de soignants.
Pour l’accompagnement des offreurs de soins, les services statistiques et contrôle de gestion : les PA et les PC rejoignent la DCGDR dès leur atterrissage en caisse (pas de phase 1 de transition) où on aura sans doute besoin d’eux pour l’accompagnement des professionnels de santé pour la gestion du risque et la maîtrise des dépenses.
Pour les PC, il est certain que les rythmes des échanges confraternels avec les PS libéraux, gagneront en intensité. Tous les MCR et les MCRA et leurs assistants de direction rejoignent en majorité les DCGDR où leur expertise devrait être utilisée dans le déploiement d’actions locales. Soyons clairs : pour les MCR et MCRA : le placard sera confortable mais le rayonnement moins ample…
Le pôle CEPRA devrait intégrer les équipes métiers (en intégrant les spécificités : l’appareillage, CMRA, CRRMP) mais on s’oriente vers une gestion des arrêts de travail par pilotage financier et avec des algorithmes, ce qui est loin des ambitions médico-sociales du service médical prévues par l’origine de la Sécurité Sociale.
Les Responsables GRC régionaux, récemment devenus « chargés de relation client » pourraient se retrouver à superviser la PFS ou l’accueil voire à gérer des dossiers complexes dans ces services, mais à ce stade, ce sont des suppositions…
Des garanties de reclassement existent-elles ?
À ce stade aucune. Le plan énonce a minima une intégration aboutie des personnels administratifs et médicaux au sein des équipes métiers des caisses sous la direction des managers des caisses, correspondant à leur activité d’origine. Exemple : les collègues PA et PC qui travaillent en UTAA sur le contrôle des IJ dans le cadre de la requête unique doivent intégrer les services de contrôle de prestations des caisses sans garantie de maintien de leurs activités actuelles, parfois – c’est à craindre – sur des sites extérieurs éloignés du site principal où ils pourraient servir de bouche trous.
Il y a lieu d’en douter fortement pour les PC.
Les collègues CSAM des pôles GRC des ESLM intègrent les services GRC des caisses mais sans garantie que leur métier de prévention de la désinsertion professionnelle (un métier médico-social qui ne manquait pas d’intérêt) des assurés en arrêt de travail, soit maintenu, vu les forts besoins des caisses pour l’accueil des assurés vu le turnover de leur personnel sur ces fonctions.
Le plan renvoie les questions de reclassement professionnel par filière et par métier à la négociation d’un accord d’accompagnement qui ne pourra pas traiter de toutes les situations. Les caisses seront libres de disposer du personnel mis à disposition dans un 1er temps au grés de ses propres besoins.
Quels choix d’affection seraient proposés au personnel ?
À ce stade : rien n’est écrit. Toutefois, les caisses ont des impératifs de production peu compatibles avec une pleine liberté d’affectation des agents au gré de leurs projets. Le plan rappelle simplement le protocole d’accord sur l’évolution des réseaux de 2013 qui garantit l’absence de mobilité imposée sans l’accord des agents. Il y a fort à parier que les affectations dans le cadre d’une équipe métier, voire au-delà dans des sites extérieurs, seront imposées par les directions de caisses une fois que les personnels auront intégré les équipes des caisses 12 mois maximum après la fusion DRSM/caisse. Car pour cela, l’accord du salarié n’est pas obligatoire.
Quelle contrepartie pour les ISM dont le périmètre d’activité pourrait être étendu (niveau d’expertise des PA, délégation de signature des médecins) ?
On parle de 25 points de compétences et d’une obligation de valider 2 blocs de formation mais cela ne figure pas in extenso dans le plan de suppression du service médical. Les ISM voient disparaitre leur collectif de travail national, actuellement en construction et risquent d’être isolés au milieu d’agents administratifs de caisses, certes très sympathiques, mais auprès desquels le métier d’ISM n’a jamais existé ; et où les préoccupations médicales – une caisse est avant tout une usine à liquider des paiements– seront subalternes. En clair, comme les PC, les ISM finiront vite par passer pour des enquiquineurs de 1ère. On craint un choc des cultures abruptes. Surtout, rien n’est réglé dans ce plan s’agissant de la reconnaissance et du statut comme professionnel de santé des ISM dans la classification, d’un système de rémunération homogènes quelles que soient leurs activités ou de la valorisation de leur montée en compétence dans la prise en charge de certains avis médicaux. La grève totale du 3 octobre portent aussi ces revendications importantes.
Quel avenir pour les Praticiens Conseil dans cette nouvelle organisation ?
L’avenir des PC semble compromis. Le plan ne donne aucune précision sur leurs missions et leur devenir dans la nouvelle organisation en caisse. On s’interroge sur l’avenir de l’expertise médicale qui sera transférée vers les ISM à moindre frais. Au bout de 12 mois, les PC intègrent les équipes métier et leur management sera administratif dans la plupart des cas. Seul est mentionné le maintien des avantages catégoriels des PC, de leur convention collective (grilles et mesures afférentes) et un rappel du nécessaire respect des règles déontologiques « garanties » par une pseudo commission nationale. Mais cela n’a rien à voir avec les conditions de travail quotidiennes des PC et le maintien d’un réseau médical protecteur pour les assurés. Rien n’est précisé pour les ISM et les PC du Service Médical ayant des activités multiples. Rien non plus le devenir de la prise en charge de la formation obligatoire des professionnels de santé organisée jusqu’alors assurée par la CNAM. En outre, si on en croit les pratiques de la caisse nationale où nombre de jeunes professionnels de santé sont recrutés sur la grille administrative, il n’est pas impossible qu’à l’échelle de quelques années, le corps national des PC finisse en réserve d’indiens.
Quid de l’indépendance technique et du respect du secret médical pour les professions de santé ?
Le projet prévoit que les praticiens-conseils soient directement rattachés aux CPAM, avec un lien de subordination au directeur de la CPAM, responsable de leur évaluation et de leur avancement. La jurisprudence est pourtant claire sur la question de l’indépendance technique des praticiens-conseils :
Conseil d’État N° 342699 : « Les praticiens-conseils appartiennent à un corps autonome, dont les conditions de nomination et d’avancement garantissent leur indépendance à l’égard des caisses de sécurité sociale. » Toute atteinte à cette indépendance fragiliserait la crédibilité des praticiens-conseils, notamment dans le cadre des recours contre tiers, où notre impartialité est essentielle pour que nos attestations soient recevables devant les tribunaux.
Le plan de suppression du service médical met également en péril le secret médical, en particulier lors de la phase 2, où les missions des praticiens-conseils seront dissoutes dans les différents services des CPAM. Il est précisé que ces missions seront exercées dans une approche médico-administrative, par délégation du directeur médical.
Cela signifie-t-il que tous les personnels des CPAM, potentiellement plus de 80 000 salariés, y compris des CDD, pourraient devenir dépositaires du secret médical par cette délégation ? Cette perspective semble inacceptable et incompatible avec les exigences de confidentialité et de respect des données médicales.
Que deviennent les accords RTT, HV, télétravail qui régissent le travail dans les DRSM ?
Les accords d’établissement et d’entreprises sont caducs à la disparition du service médical après le temps de mise à disposition envisagé par le plan pour contourner le code du travail et les obligations inhérentes au changement imposé d’employeur. A ce jour, l’accord explicité du salarié pour une mise à disposition reste obligatoire mais on sait que la Cnam et le ministère ont de puissant relais parlementaire pour que des amendements à la LFSS 2025 viennent amender le cadre juridique existant. Une fois les mises à dispositions terminées, ce seront alors les accords signés par les syndicats présents dans la caisse qui s’imposeront, donc largement dépendants de contextes locaux. Sur la feuille de paie, les salariés devront aussi cotiser au chômage car les caisses sont, contrairement à la Cnam, des organismes de droit privé.
En bref, le plan prépare la destruction de l’uniformisation du service médical mis en place depuis 2015 et la fin des négociations sociales nationales qui ont prévalu depuis l’intégration des PA à la Cnam.
À ce titre, il doit être souligné la duplicité de la direction de la Cnam qui a refusé les 3 jours de télétravail aux DRSM lors de la négociation nationale de juin 2024 mais qui en fait, dans son plan et sans pudeur un argument d’attractivité (un « avantage ») pour accepter d’être déplacé en caisse (même si d’ailleurs, tous les caisses ne sont pas au 3 jours de télétravail) ! Le plan table sur un changement de la Loi pour rendre contraignante les mutations collectives. Mais pour l’heure, cette modification du cadre juridique n’existe pas, et il n’est pas gagné que la direction obtienne une majorité au Parlement pour cela.
Que deviennent les CSE des DRSM ?
Ils disparaissent, le patrimoine devra être liquidé et les personnels du service médical bénéficieront des prestations sociales et culturelles des caisses où la dotation pour la culture et les activités est loin des 2,75% équivalent de la masse salariale en vigueur à la Cnam (grâce aux syndicats). Il faudra aussi partager la manne des salaires des PC avec tous les autres agents de la caisse.
Comment seront traitées les questions d’organisation du travail ?
Rien n’est dit dans le plan. Tout est renvoyé à un éventuel accord d’accompagnement où une « commission de suivi » ne manquera pas d’être citée pour faire joli. Dans les faits, dès l’arrivée du personnel du service médical en caisse, ces questions seront traitées dans les CSE des caisses : des CSE aux élections desquelles le personnel du service médical n’aura d’ailleurs pas participé. Pour les élections suivantes : il n’y a aucune garantie que les PC continuent de pouvoir voter dans un collège sur-mesure et complètement dérogatoire comme c’était le cas à la Cnam depuis 2015.
Quelles perspectives et opportunités professionnelle faut-il espérer en caisses ?
Des recrutements internes sont déjà engagés (il suffit d’allez-voir « La Sécu recrute » pour s’en rendre compte …) mais à l’arrivée il faudra à chaque fois faire sa place et jouer des coudes. Les cadres du service médical garderont leur statut mais il n’est pas certain qu’il y ait des places de managers pour tout le monde. Et cet afflux n’aidera pas les PA, même plein d’ambition, dans la volonté de le devenir. Par ailleurs, une caisse est une société humaine comme une autre : des règles féodales et grégaires implicites y régissent les relations humaines comme ailleurs : « derniers arrivés, derniers servis », « les copains d’abord ». Regarder la situation des salariés issus de l’assurance Maladie dans les ARS permet de se faire une idée de ce qui pourrait advenir. Le discours des « opportunités » va s’avérer vite être frelaté.
Sous quelle forme les agents seront intégrés dans les caisses ?
En l’absence de cadre juridique, un détachement semble prévu, puis une éventuelle mise à disposition sur plusieurs années. La modification attendue du « cadre juridique » correspond à une nécessaire modification du Code de la Sécurité Sociale par voie législative et avis du Parlement pour permettre la dissolution du Service du contrôle médical de l’Assurance Maladie instauré par les ordonnance de 1967 et créée par les ordonnances de 1945.
Quelles perspectives pour les agents de niveau 3 ?
Très peu. Les PA de Niveau 3 vont arriver dans une entreprise où les agents d’accueils sont embauchés directement à niveau 4. On craint donc qu’ils soient traités comme les dernières roues du carrosse, au mieux comme un main d’œuvre corvéable. Et ce n’est pas le sac de points attribués à chaque caisse pour les avancements (rarement au-dessus de 20% d’agents augmentés dans l’année) qui permettra s d’espérer une promotion rapide. Un éventuel accord d’accompagnement pourrait être l’occasion de négocier un N4 pour tout le monde à l’arrivée en caisse mais vu l’état d’esprit et la considération exprimés par les auteurs du plan de suppression du service médical pour son personnel, il ne sert à rien de vendre de faux espoirs.
Le jeudi 3 octobre 2024 est une journée de grève totale.
Le personnel gréviste est invité à soutenir les élus du CSE-Central en se rassemblant, quand cela est possible, devant la Caisse nationale* (pour la DRSMIF) et devant les DRSM en régions à partir de 9h30 le jeudi 3 octobre 2024.
* 50 avenue du Professeur Lemierre – 75020 Paris (Métro : Porte de de Montreuil ou Gallieni).