#Billet dur : activité privée à l’hôpital public

En 1958 a été créé un statut de médecin hospitalier à temps plein pour en finir avec une présence insuffisante des praticiens dans les services car ils privilégiaient leur activité privée dans leur cabinet.

Afin de rendre ce nouveau statut attractif, en particulier pour ceux qui étaient aussi professeurs d’université, la loi autorisait la possibilité d’une activité libérale à l’hôpital public.

Ces mesures pouvaient sembler pertinentes à cette époque pour attirer les médecins vers l’hôpital. Cependant, dès les années 1970, leur justification était remise en cause car elles créaient une inégalité de traitement des patients au sein d’un service public.

C’est ainsi que la suppression de ce droit a été inscrite dans le programme de F. Mitterrand lors des présidentielles de 1981.

Malheureusement, le ministre communiste de la santé de l’époque, Jack Ralite, est resté trop peu de temps en poste pour la mettre en œuvre.

Depuis, aucun gouvernement ne s’est attaqué au problème. Or, aujourd’hui, ce privilège est scandaleux et immoral. Les chiffres issus du rapport 2021 pour l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris sont éclairants : 350 médecins disposent d’une autorisation pour une moyenne individuelle d’honoraires annuels de 132 000 euros, avec 78 qui sont au-dessus de 200 000 euros et 16 au-dessus de 400 000 euros.

Alors qu’une bonne partie des médecins ne respectent pas les règles qui sont qu’ils ne doivent pas consacrer plus de 20 % de leur temps à cette activité et que le nombre de consultations et d’actes effectués au titre de l’activité libérale doit être inférieur au nombre de consultations et d’actes effectués au titre de l’activité publique, aucune sanction n’est prise et le système perdure.

Or, sans même abroger la loi, nous disposons d’une jurisprudence très claire qui permettrait de suspendre la quasi-totalité des autorisations d’exercice.

Il s’agit d’un arrêt du Conseil d’Etat de 2002 qui confirme la justesse de la décision du CHU de Limoges de ne pas renouveler cette autorisation pour un praticien au motif du différentiel de délai de rendez-vous entre les prises en charge dans le secteur privé par rapport au public, du fait du non-respect du principe constitutionnel d’égalité de traitement de tout citoyen par le service public.

Aujourd’hui, cette situation est une constante et a été mise en lumière par de nombreuses opérations de testing effectuées par des organisations de consommateurs ou des associations de patients.

Alors que le gouvernement utilise très largement des articles de la Constitution pour tordre le bras à la démocratie, il serait bon que tous ses articles soient appliqués, en particulier quand il s’agit de l’intérêt des citoyens.

Certains évoquent la nécessité de contreparties, notamment financières, pour éviter la fuite de ces médecins vers le secteur privé.

Et bien banco pour une revalorisation absolument nécessaire des rémunérations de l’ensemble des médecins hospitaliers, afin que l’hôpital public retrouve son attractivité qui ne peut passer par des compléments de revenus issus d’une activité privée annexe.

Dr Christophe Prudhomme

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