La crise que connaît notre système de santé nécessite une rupture avec le vieux modèle de la médecine libérale reposant sur les deux principes de la liberté d’installation et la rémunération à l’acte.
Le constat est sans appel. Même si nous avons besoin de plus de médecins, les difficultés d’accès aux soins sont liées aujourd’hui avant tout à l’absence de régulation de l’installation des médecins et au paiement à l’acte, avec son corollaire que sont les dépassements d’honoraires.
A la fin du siècle dernier, quand nous proposions l’alternative des centres de santé avec des médecins salariés, nous étions taxés de collectivistes qui voulaient introduire en France un système qui s’était révélé un échec du côté de l’URSS.
Aujourd’hui, de très nombreuses collectivités locales, toutes tendances politiques confondues, ont mis en œuvre ou ont en projet l’embauche de médecins salariés afin de pouvoir répondre à une population de plus en plus en colère de ne pas pouvoir bénéficier d’un médecin traitant et d’être obligée de sortir la carte bleue pour avoir accès à un spécialiste.
La première collectivité locale à avoir développé la médecine salariée au sein de centres de santé est le département de Saône-et-Loire dirigée par un président apparenté LR. Dirigées par la gauche, les régions Centre-Val de Loire et Occitanie ont suivi et le département du Nord entre également en lice.
Ces derniers jours nous avons appris que les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Ile-de-France se lancent également dans ces projets.
A ce que je sache, ces deux entités ne sont pas dirigées par des « collectivistes » ! Un autre engagement intéressant est celui de l’association UFC-Que Choisir qui propose le salariat des médecins pour pouvoir réguler efficacement leur installation.
Ces évolutions sont intéressantes car elles correspondent aussi à une forte aspiration de très nombreux jeunes médecins qui souhaitent des conditions de travail qui leur permettent de se consacrer exclusivement à leur métier et d’être dégagés des tâches administratives et de gestion.
Cependant, nous sommes confrontés à un refus idéologique du gouvernement, relayé par le directeur général de l’Assurance maladie, d’ouvrir en grand cette porte afin de pouvoir sortir de la crise actuelle qui ne peut que s’aggraver du fait de la baisse du nombre de médecins qui va durer jusqu’en 2030.
Nous sommes confrontés là encore à la perversité des libéraux qui dégradent sciemment le système afin que la seule alternative devienne des réseaux de soins contrôlés par des assurances, s’attachant des médecins dont l’accès sera réservé à leurs clients.
Il donc urgent que les assurés sociaux exigent un autre mode d’exercice des médecins qui repose sur le salariat, car il s’agit de la seule solution efficace pour pouvoir répondre aux deux exigences de la régulation de l’installation et de la disparition des dépassements d’honoraires.
Cette solution est aussi dans l’intérêt des médecins s’ils ne veulent pas tomber sous la coupe des compagnies d’assurance privées dont l’intérêt ne sera pas de veiller à leurs conditions de travail mais d’exiger d’eux la meilleure rentabilité possible.
Dr Christophe Prudhomme
2 réflexions au sujet de « # Billet doux : Salarier les médecins »
Trouvez-vous normal que l’Assurance Maladie finance les retraites des professionnels de santé avec les cotisations des salariés ? (à hauteur de 11,5 % pour les PS salariés (disposition Teulade) et des 2/3 pour les libéraux)
NON mais la Cgt est un syndicat et non un législateur. En outre, les caisses d’assurance maladie ne sont définitivement plus administrées par des élus des salariés depuis 1980 (dernière élections dans la Sécu en date) et c’est maintenant l’État (bien plus que les parlementaires voire les gouvernements eux-mêmes) qui est à la manœuvre. Et tout ceci s’est fait par la vote, le consentement sinon le désir d’une majorité, vu qu’on ne peut pas dire que ni la contestation des exonération de cotisations sociales, l’austérité, la politique salariale dans la Sécu (qui fait que 25 à 30% des travailleurs des caisses sont maintenant des salariés pauvres et subventionnés par la prime d’activité plutôt rémunérés par leur salaire) n’aient fait l’objet de réflexion très longue dans la population ni que celle-ci aient particulièrement brillé pour son intérêt pour ces affaires de Sécu qui concernent pourtant la manière dont elle va être soignée quand cela ira pas du tout. Qui sème le vent…