Brigades sanitaires Covid19 : la précipitation peut-elle tout justifier ?

Alors même que la prorogation de la loi d’Etat d’urgence qui crée les brigades sanitaires n’était pas votée, les 16 CSE de la Cnam (et des CPAM) ont été convoqués pour se prononcer avant leur mise en place. Une aberration parmi d’autres tant la création de ces  « brigades » ont été faite sans ne rien respecter, ou pas grand chose. Rappel : ces équipes de l’Assurance Maladie vont se charger du Contact Tracing conçu pour organiser le dépistage et le confinement ayant été en contact avec des malades du Covid19. Analyse.

Que peut-on faire quand on n’a ni masques, ni de quoi tester la population, qu’on doit déconfiner le pays pour sauver l’économie en se protégeant d’une 2nde vague qui pourrait être pire que la première, qu’il faut rassurer la population tout en lui faisant porter la responsabilité de renvoyer ses enfants à l’école ?

L’Etat fait le pari du tracing, du dépistage et du confinement ciblé et pour ce faire crée des « brigade sanitaires ».

Après avoir envoyé au front nos soignants, déplumés de longues date par des années d’austérité budgétaire (69 000 lits en 15 ans et 100 000 postes sur 8 ans supprimés dans les hôpitaux, un millier de chefs de services prêts à démissionner au mois de janvier, un ratio de lits de réanimation par habitant 4 ou 5 fois inférieur à celui de nos voisins allemands) pourquoi ne pas rester sur le même modèle et confier le tracing à la Sécurité Sociale qui a connu elle aussi de sévères restrictions budgétaires, ayant entrainé la fermeture d’organismes et la suppression de milliers de postes, l’absence d’embauche, le non remplacement des départs en retraites, une charge de travail qui par la force des choses augmente inexorablement alors que dans le même temps la valeur du point et les salaires restent bloqués. Pourquoi ne pas aller y chercher les 4000 ETP nécessaires ?

Depuis le début de cette crise, l’Etat sait qu’il peut compter sur ses petites mains, celles-là même qu’il méprise depuis des années. Celles-là même à qui, il n’y a encore pas très longtemps, on envoyait les CRS lorsqu’elles manifestaient leur mécontentement face à leur manque de moyens. Force est de constater que l’incompétence et le ridicule ne tuent pas.

Audiard disait bien qu’on reconnaissait certains au fait qu’ils osent tout … et bien nous y sommes.

Ridicule dans la gestion de cette crise (on pense aux hésitations sur le port du masque), incapable de mettre en place autre chose que du bricolage (incapacité à organiser un dépistage massif quand l’OMS recommande depuis le 16 mars : « testez, testez, testez »), l’Etat passe en force encore une fois…Mais n’est-ce pas ce qu’il fait de mieux ?

Sous couvert d’état d’urgence sanitaire, les pouvoirs publics enterrent le secret médical et vont balayer d’un revers d’ordonnance de nombreux acquis sociaux (horaires de travail, durée du travail, travail du week-end et des jours fériés) en agitant la carotte des 4%, quelques heures supplémentaires payées et des week-end majorés (sachant que certaines CPAM les ont déjà réservés à leurs agents !)

La crise sanitaire ne doit pas être le prétexte à de nouveaux reculs sociaux et le travail sous l’autorité de la Caisse, à des inégalités de traitement. Nous savons pertinemment les difficultés rencontrées par les agents mis à disposition des caisses (problème pour la pose des congés, problème d’arbitrage des litiges entre agents, différence d’équipement, double management, etc.). Et vous verrez que d’ici peu, on qualifiera de traîtres ceux qui émettrons des réserves sur ce galimatias de décisions prises à l’emporte-pièces, sans la moindre idée directrice !

Depuis le début de cette crise, les équipes des DRSM  ont montré à de nombreuses reprises qu’elles savent s’adapter, même dans des conditions dégradées et il y a fort à parier qu’une fois de plus, elles le feront. Aussi, nous ne nous permettrons pas d’enjoindre le personnel à refuser cette mission ; il y a des volontaires et même si leurs motivations sont diverses, elles sont toutes respectables, notamment lorsqu’elles sont alimentaires.

Mais aujourd’hui nous vivons un simulacre d’information/consultation des CSE.

Les représentants du personnel sont sollicités pour avis uniquement sur la mise à disposition d’agent du Service Médical auprès des CPAM :

  • alors que les organigrammes sont déjà remontés à la CNAM, les plannings préparés, les formations organisées, et les congés de certains annulés ;
  • qu’il n’y a pas eu le moindre dialogue social préalable à la mise en place de cette nouvelle activité ;
  • en l’absence de texte juridique étendant le champ des missions des CPAM et habilitant expressément les personnels à accéder à des données de santé nominatives, sans qu’aucun texte n’autorise l’Assurance Maladie à déroger aux règles légales et conventionnelles applicables au repos hebdomadaire ;
  • avec de gros doutes sur le respect du volontariat ;
  • avec de gros doutes quant à la réalité des bonus financiers prévus (heures supplémentaires et heures majorées.).

Nous demandons d’ailleurs qu’un bilan du volume et de l’utilisation des heures supplémentaires réalisées soit présenté au CSE.

Dans ce contexte, la CGT émet un avis défavorable à cette mise à disposition d’agents, tout comme elle se déclare défavorable à l’économie générale du projet, et notre seul regret est de l’exprimer devant la Direction Régionale et non pas devant le Directeur Général dans le cadre d’une consultation du CSEC, voir devant ceux qui, il y a quelques mois, souhaitaient brader la solidarité publique en supprimant « notre Sécu » de la constitution.

Une réflexion au sujet de « Brigades sanitaires Covid19 : la précipitation peut-elle tout justifier ? »

  1. Fort bonne et juste analyse ! Manque juste une chose : La facture finale , c’est à dire le relèvement des impôts et taxes sur les petits et moyens salaires , car le système privilégie les hauts salaires et revenus…. Mais ils vont y arriver , je m’y attends (depuis plus de 30 ans , en fait ! ) car maintenant l’occasion est trop belle !

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