# Billet dur : Financiarisation de la biologie médicale

Si les lecteurs de mes chroniques sont habitués à l’évocation du monde de la finance, il est plus inhabituel qu’un rapport conjoint des Académies de Médecine et de Pharmacie utilise ce vocabulaire.

En voici un extrait : « Les pouvoirs publics n’assument pas leur rôle de régulateur, permettant ainsi que la financiarisation à outrance de la Biologie Médicale s’amplifie considérablement et conduise à des regroupements démesurés des Laboratoires de Biologie Médicale (LBM), destructeurs et sources de risques sanitaires. Le résultat est que les LBM de ville, dont on connaît déjà la mauvaise répartition territoriale, deviennent progressivement de simples sites de prélèvement, les patients se retrouvant alors seuls, souvent angoissés, avec leurs résultats transmis par internet sans interprétation. ».

Ce milieu habitué à l’exercice libéral individuel ou regroupé entre professionnels n’a vraiment rien de révolutionnaire, mais il est aujourd’hui attaqué dans son indépendance d’exercice du fait de la mise à bas d’une législation française protectrice par la logique marchande imposée par l’Union Européenne.

Ses représentants mettent en avant l’abandon des valeurs sur lesquelles ils fondent leur exercice : la liberté, l’humanité, la proximité, la performance et l’innovation.

Le rapport insiste également sur le fait que les jeunes biologistes ont un travail dont l’intérêt est de plus en plus réduit.

L’indépendance de leur exercice professionnel dans de telles structures est théorique, et leur poids dans les décisions est pratiquement nul. Leur argumentation est très significative justement de l’affrontement autour des valeurs qui caractérisent aujourd’hui de nombreuses luttes contre le néolibéralisme imposé à marche forcée par l’Union Européenne avec ses relais nationaux comme E. Macron.

Le rapport évoque les groupes financiers qui profitent de l’aubaine du départ à la retraite des biologistes en créant une bulle spéculative alimentée par des mécanismes de LBO, c’est-à-dire par l’endettement et le remboursement ensuite par les bénéfices de l’entreprise rachetée.

Les sommes qui atteignaient il y a quelques temps des centaines de millions d’euros, se chiffrent maintenant en milliards avec la consolidation dans des groupes internationaux comme BIOGROUP, CERBA, INOVIE ou EUROFINS qui sont la propriété de sociétés financières et de fonds de pension.

Actuellement une dizaine de grands groupes réalisent 70 % de l’activité et des rachats sont prévus avec pour conséquence la constitution de quelques groupes ayant le monopole de l’activité. Cette activité a toujours été très rentable avec un financement assuré par la Sécurité sociale.

La crise COVID a fait exploser les chiffres d’affaires et les bénéfices du fait du maintien pendant une longue période de tarifs, notamment pour les tests, très élevés par rapport aux coûts réels. Aujourd’hui, organisés en lobby, ils protestent contre la volonté du gouvernement de leur imposer une réduction des tarifs totalement justifiée.

Espérons qu’il ne reculera pas une fois de plus devant ce que ces académiciens appellent comme nous le monde de la finance

Dr Christophe Prudhomme

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