Une de ces start-ups chères à E. Macron propose, dans ce qui est devenu le marché lucratif de la santé, un service permettant d’avoir un deuxième avis médical dans un vaste éventail de maladies.
La présentation du service est très alléchante avec la proposition d’accéder en moins de 7 jours à un avis d’experts « connus, reconnus internationalement, qui font de la recherche, publient et qui exercent dans la pathologie pour laquelle ils se déclarent référents ».
Pour une rémunération de 120 euros, le médecin ne voit pas le patient mais réalise une « expertise » du dossier médical du patient.
L’astuce de l’entreprise est d’avoir proposé ce service aux assureurs (complémentaire santé et institutions de prévoyance) qui incluent ce service dans la liste de leurs prestations. Ainsi la première page du site deuxiemeavis .fr vous invite à compléter une série de questions pour savoir si vous êtes couvert.
Dans le cas contraire, vous pouvez accéder à la prestation en réglant directement la somme de 120 euros. Les assurances qui ont contracté avec cette société ne paient pas à l’acte mais versent un montant annuel en fonction du nombre de personnes qu’elles protègent, ce qui permet ainsi vraisemblablement de dégager un généreux bénéfices pour les actionnaires de la société qui est dirigée par une diplômée de HEC qui travaillait auparavant chez la compagnie d’ascenseurs OTIS avant de créer un site internet de listes de mariage et de cadeaux.
Au premier abord, ce service peut apparaître intéressant pour les patients qui ont de plus en plus de difficultés pour avoir accès à un spécialiste afin d’avoir un avis qualifié, spécialistes qui par ailleurs sont de plus en plus nombreux à demander des dépassements d’honoraires qui ne sont pas couverts en totalité par les complémentaires santé.
Il s’agit d’une dérive très dangereuse qui est en contradiction totale avec ce qui est appelé le parcours de soins pour l’organisation duquel les médecins reçoivent aujourd’hui une rémunération forfaitaire par l’assurance maladie.
Donc ce qui devrait être le fonctionnement normal dans notre système de santé devient un service payant au grand bénéfice des très nombreuses entreprises qui s’engouffrent dans ce marché.
Il faut souligner par ailleurs que le patient assuré social paye ainsi deux fois un service qui lui est normalement dû : il cotise à l’assurance maladie et il paye une complémentaire. Complémentaire dont les tarifs augmentent depuis plusieurs années bien au-delà de l’inflation du fait du transfert régulier de prestations qui ne sont plus prises en charge par l’assurance maladie et pour financer cette offre de deuxième avis.
Ce type de service participe à ce qu’on appelle la « financiarisation du système de santé » au plus grand profit d’investisseurs recherchant une rentabilité maximale. Il s’agit typiquement de ce qui existe dans certains pays comme les Etats-Unis avec pour conséquence une exclusion d’une partie de plus importante de la population d’un accès à des soins adaptés, ce qui se traduit par une aggravation des inégalités de santé avec une mortalité précoce pour les plus défavorisés.
Dr Christophe Prudhomme