#Billet doux : internes maltraités ?

Le problème des déserts médicaux devient une question politique aujourd’hui incontournable. Il faut avant tout rappeler que la pénurie de médecins a été sciemment organisée par les différents gouvernements sous l’argument fallacieux que la diminution du nombre de médecins diminuerait le nombre de prescripteurs et donc les dépenses de la Sécurité sociale.

Les représentants de la corporation médicale ont accompagné le mouvement, pensant que si le gâteau était moins gros, il ne faudrait pas être trop nombreux à se le partager. Il est donc étonnant de constater que des politiques qui étaient déjà en poste de responsabilité à l’époque, notamment au Sénat, proposent aujourd’hui d’utiliser les internes, c’est-à-dire les médecins en fin de formation, pour corriger leurs erreurs du passé.

Les internes en médecine générale sont donc légitimes à refuser d’être ainsi instrumentalisés en se voyant imposer une 4e année dans leur cursus pour aller exercer dans les zones où il manque de médecins.

Cette proposition n’est pas dans l’intérêt des patients qui sont déjà pénalisés du fait de leur lieu de résidence et qui se verraient proposer d’être pris en charge par des étudiants sans réelle expérience.

Pour les internes, il s’agit d’une ineptie car leur formation repose sur un encadrement pas des maîtres de stage qui n’existeront pas ou qui n’auront pas le temps de s’occuper de les accompagner. Ce nouveau bricolage est inacceptable et est l’expression au mieux d’une incurie, au pire d’une politique assumée d’abandon des territoires qui ne font pas partie de la « start up nation » chère à E. Macron !

En fait, il s’agit d’installer dans ces territoires déjà défavorisés un service de santé dégradé, car il faut souligner que c’est aussi là que des services d’urgence ferment et que les hôpitaux perdent leur maternité et leur service de chirurgie.

Nous devons aujourd’hui proposer autre chose aux futurs médecins qui ne se retrouvent plus dans le système sclérosé de la médecine libérale.

Il est urgent d’organiser un autre mode d’exercice afin de pouvoir réguler intelligemment l’installation des médecins. Une aspiration grandissante existe chez les jeunes médecins à un travail en équipe dans des structures où ils sont salariés et ne font que de la médecine, les autres tâches d’organisation, de gestion et de logistique étant assurées par des personnes dont c’est le métier.

Il s’agit donc de proposer des postes dans des structures de type centres de santé avec la possibilité d’exercice mixte ville-hôpital, notamment pour les spécialistes, qui seront installés et financés par la Sécurité sociale là où sont les besoins.

Une expérience intéressante de ce type existe en Saône-et-Loire et a montré son efficacité. Il s’agit donc maintenant de la généraliser à l’ensemble du territoire en n’autorisant l’installation des médecins que dans ce cadre, afin de pouvoir répondre aux besoins de la population, tout en accompagnant les futurs médecins dans leurs premières années d’exercice.

Dr Christophe Prudhomme

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