# Billet doux : alerte sur les greffes

Un des grands progrès de la médecine de la fin du 20e siècle a été le développement des greffes d’organes qui a permis de sauver des centaines de milliers de vies dans le monde.

En effet, cette activité s’est développée dans de très nombreux pays avec actuellement un total d’environ 150 000 greffes par an dans le monde.

Cependant, une tribune publiée récemment par la Société Francophone de Transplantation et des associations de patients alerte sur les freins à cette activité en France.

Une des causes qui n’est pas nouvelle est la réticence vis-à-vis du don d’organes qui a progressé ces dernières années dans notre pays. Cela se traduit par un nombre de donneurs de 26 par million d’habitants alors que l’Espagne est à 46 et les Etats-Unis à 44.

En quelques chiffres, voilà la situation en France : 5 500 greffes réalisées chaque année, 500 greffes effectuées à partir de donneurs vivants, 22 000 personnes en liste d’attente dont plus de 11 000 en liste d’attente active, c’est-à-dire présentant une menace vitale à court terme.

Mais deux autres éléments sont particulièrement inquiétants. Il s’agit, je cite, d’un « contexte de pénurie de matériels et de personnels et de difficultés logistiques, résultant à la fois d’une conjoncture défavorable qui règne à l’hôpital public et d’un manque de priorisation vis-à-vis de cette activité chirurgicale exceptionnelle ». Plus précisément est évoqué « un manque criant de personnels soignants » dont la conséquence sont « des retards majeurs à la prise en charge et des pertes de chance pour les patients et leurs familles ». Bel euphémisme pour évoquer les 800 décès par an de personnes en attente de greffe.

Nous ne pouvons que constater amèrement que la cure d’austérité budgétaire imposée à l’hôpital depuis maintenant de nombreuses années avec la fermeture de très nombreux hôpitaux de proximité qui reporte l’activité vers les CHU, aboutit à une catastrophe.

En effet, ces derniers doivent suppléer sans moyens supplémentaires à un afflux de patients pour des pathologies courantes car ils sont le dernier recours. Cet engorgement ne leur permet plus de se concentrer sur les activités très spécialisées que sont les greffes. La responsabilité de nos gouvernants est donc engagée face à toutes ces morts évitables qui ont d’abord été mises en lumière dans les services d’urgence et qui touchent maintenant des activités aussi essentielles que les greffes d’organes.

Dans une expression policée, la tribune énonce un certain nombre de propositions qui rejoignent complètement celles des personnels mises sur la table par leurs organisations syndicales. Arrêt des fermetures de lits, formation et embauche massive de personnels, demande de crédits fléchés et dédiés pour les activités hautement spécialisées. Bref, il s’agit d’une remise en cause de la politique qui, sous le faux argument de la fameuse dette que nous allons laisser à nos enfants, impose des mesures d’économies, comme encore les 10 milliards annoncés par le ministre des Finances, dont la conséquence brutale sont des morts qui pourraient être évitées.

Dr Christophe Prudhomme

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